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Jean-Jacques Terrin, les cinq premieres minutes, ou l’influence des données en amont du projet jeudi


1. Le projet du projet

Les premieres etapes d’un projet sont celles au cours desquelles reves, utopies, desirs, mais aussi exigences et contraintes, donnees contradictoires et pourtant necessairement convergentes, trouvent un ordre ou et incertain. C’est le temps heroique ou l’on peut tout envisager alors que l’on ne sait pas grand-chose, oùl’on tente de representer ce qui n’existe pas encore, de convaincre et de surmonter les obstacles d’une progressive materialisation. C’est aussi le moment de la rencontre de personnes qui se decouvrent souvent pour la premiere fois, de leurs savoirs et de leurs savoir-faire. Mais àl’heure du developpement durable, de la democratie participative, de la revolution digitale, de l’ubiquité des reseaux sociaux et de l’emergence de l’intelligence

artificielle, cette phase amont change de statut et de mode d’expression. Àl’articulation de la connaissance et de l’action, elle devient projet à part entiere, elle devient le projet du projet.

Exemple : la programmation d’une gare contemporaine Contre-exemple : Les Halles, Paris ou la fatalité de l’amenagement

2. Produire de la donnee

Pour faire face àces enjeux de societé, d’importants ux de donnees s’imposent et bousculent les processus de projet traditionnels. L’ideation, etape trop negligee ou confisquee par certains, devient àla fois le temps du diagnostic et celui de l’inclusion des parties prenantes. Les demarches sequentielles sont troquees pour des parcours d’innovation forcement incertains qui consistent àfavoriser les interactions entre une intelligence relationnelle, et une puissance de calcul rendue possible par l’omnipresence du numerique.

Exemple : la lutte contre les ilots de chaleur et l’importance du diagnostic pour l’agence d’ ecologie urbaine de Barcelone.

3. Coproduire des choix, non des solutions

Le projet du projet est donc une phase d’integration de donnees mais aussi un espace dedié aux echanges et aux representations partagees. Il facilite la coproduction de choix plutot que la prise de decision ou la formulation de solutions. Prendre en compte cette perspective, c’est bouleverser les procedures actuelles en mettant la priorite d’une part sur la realisation de diagnostics croises, en elaborant d’autre part des visions construites a la fois depuis le haut et à partir du bas.

Exemple : demarches de visioning/partnering sur les projets de Montreal.

La mobilisation de parties prenantes issues d’horizons divers impose un cadre structuréet des methodes assumees. Physique ou virtuel, laboratoire d’innovation, incubateur d’idées, embrayeur de debats, le projet du projet est un espace de densité creative qui permet de capitaliser les données et de transmettre les connaissances.

Exemple : la tente interactive du projet IPCity.

Jean-Jacques Terrin est architecte urbaniste, docteur en architecture, HDR. Il est actuellement professeur émérite à l’ENSA Versailles ; directeur de recherche au Lab’Urba, université Paris Est ; professeur associé à l’université de Montréal et à l’université polytechnique de Tirana, Albanie. Ses recherches et publications sont orientées sur les stratégies de l’innovation, l’évolution des processus de conception et les démarches participatives. Ses activités dans le cadre de projets européens lui assurent une bonne connaissance des enjeux et des modes de fabrication de la ville européenne.

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